Réussir le passage à la retraite : les questions clés à se poser pour se réinventer

20 juin 2025

Oser s’interroger : première étape d’une retraite choisie

La retraite : pour beaucoup, elle marque d’abord la fin des horaires, des réunions, de la pression professionnelle. Mais elle n’est pas qu’une page blanche : c’est un terrain d’aventures, une nouvelle étape à façonner. Au cours de nos expériences et rencontres, une certitude nous est venue : la qualité de la retraite dépend largement des questions que l’on ose se poser avant de franchir ce cap.

Alors, quels sont ces questionnements qui permettent à la fois d’apaiser les incertitudes et de stimuler l’envie d’agir ? Comment préparer ce moment sans le subir, mais au contraire le rendre vivant et porteur de sens ?

1. Qu’attends-je vraiment de ma retraite ?

C’est la question la plus simple – et la plus difficile. Beaucoup s’arrêtent au rêve du repos bien mérité. Mais lorsque les premiers mois passent, de nombreux retraité·es éprouvent un mélange d’enthousiasme… et de vertige face à l’espace de liberté soudain.

  • Souhaitez-vous découvrir, voyager, transmettre, ou simplement ralentir ?
  • Avez-vous des rêves longtemps remis à plus tard ? (Initiative entrepreneuriale, bénévolat, passions laissées en suspens…)
  • Quel rythme de vie vous conviendra ? Quotidien organisé ou spontané ?

D’après la DREES (Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques), 47 % des retraité·es déclarent « découvrir de nouvelles activités » dès le départ en retraite (étude 2023). Cela montre qu’il reste un vaste champ des possibles à explorer, souvent insoupçonné.

2. Comment vais-je réorganiser mes journées ?

Au fil des années, le travail rythme la vie : on se lève à heure fixe, on structure ses semaines. Soudain libéré·e de ces contraintes, comment combler cet espace ? Selon le sociologue Serge Guérin, la principale difficulté du passage à la retraite « n’est pas le manque d’activités, mais le trop-plein d’opportunités, qui peut paralyser et donner la sensation de vide ».

  • Suis-je prêt·e à expérimenter de nouveaux cadres (associatif, familial, amical, personnel) ?
  • Ai-je envie de m’impliquer dans la vie locale ? D’accroître mes liens sociaux ?
  • Comment gérer l’équilibre entre temps pour soi et présence auprès des autres ?

Donnée marquante : selon l’enquête CREDOC 2022, le nombre de retraité·es bénévoles dans les associations a progressé de 9 % en cinq ans. Les retraité·es sont le groupe le plus actif au sein du secteur associatif – preuve de leur volonté de se rendre utile.

3. Quel est mon état de santé physique et psychique ?

La retraite, c’est parfois une période ambivalente. D’un côté, un soulagement, de l’autre l’apparition ou la prise de conscience de fragilités. Mieux vaut anticiper et s’interroger en amont :

  • Ai-je des soucis de santé qui limiteront certaines activités ou déplacements ?
  • Comment mesurer mon énergie, mon désir et ma capacité à entreprendre ?
  • Mon moral : comment le préserver, l’entretenir, le réinventer au fil du temps ?

L’OMS rappelle que le « bien vieillir » implique autant la prévention que l’engagement social et cognitif (source OMS).

4. Quelle sera ma situation financière réelle ?

Impossible d’aborder la retraite sans parler d’argent. Selon l’INSEE, le revenu annuel moyen des retraité·es avoisinait 22 380 € en 2020, soit 24 % de moins que celui des actifs. Cette baisse peut déstabiliser, notamment si elle n’a pas été anticipée.

  • Ma future pension : l’ai-je précisément évaluée (toutes caisses confondues) ?
  • Connaissance des droits connexes (aides, complémentaires, avantages sociaux) : ai-je tout recensé ?
  • Mes dépenses : suis-je prêt·e à les adapter, à hiérarchiser mes envies ?

Selon la DREES, seuls 65 % des partant·es à la retraite se sont vraiment renseigné·es sur leur pension effective — or, une mauvaise surprise peut affecter tous les aspects du nouveau quotidien (DREES, 2023).

5. Quels liens sociaux vais-je cultiver ?

Quitter la vie professionnelle, c’est parfois laisser derrière soi un réseau précieux. Or, 56 % des Français·es déclarent que leurs relations amicales se sont modifiées au passage à la retraite (Ifop, 2021). Pour certains, c’est l’occasion d’élargir le cercle ; pour d’autres, le risque d’isolement existe.

  • Désirez-vous renforcer vos liens familiaux ? Découvrir de nouvelles communautés ?
  • Êtes-vous prêt·e à aller vers les autres et à initier de nouveaux contacts ?
  • Souhaitez-vous transmettre (savoir, temps, engagement) aux plus jeunes générations ?

De nombreux dispositifs existent pour favoriser la rencontre intergénérationnelle ou l’engagement local : clubs, ateliers, mentorat, etc. Selon France Bénévolat, plus de 700 000 retraité·es deviennent bénévoles chaque année (chiffres 2022).

6. Quelles passions, compétences, savoirs ai-je envie de (re)mettre en avant ?

L’arrêt de la vie professionnelle est aussi, pour beaucoup, celui d’une identité. Mais l’expérience acquise n’est pas à ranger dans un tiroir. S’interroger sur ses savoir-faire, c’est réinventer sa place dans la société – et retrouver estime et énergie.

  • Voulez-vous transmettre vos acquis ? Monter un projet ? Aider une cause ?
  • Peut-être est-ce le moment de vous former à un loisir créatif, une gymnastique, ou même à Internet ?
  • Quelles compétences avez-vous qui manquent autour de vous ?

La France compte plus de 120 000 associations créées ou animées par des retraité·es, de la petite structure de quartier à la coopérative innovante (France Bénévolat).

7. Ma retraite sera-t-elle l’occasion de nouveaux engagements ?

Le temps libéré permet de concrétiser des projets qui étaient incompatibles avec la vie active. Cela peut aller du bénévolat à l’écriture, en passant par des engagements citoyens ou associatifs.

  • Ai-je repéré, dans mon environnement, des besoins non couverts ? (lutte contre l’isolement, ateliers de lecture, jardins partagés…)
  • Le volontariat, l’aide ponctuelle, l’action solidaire m’attirent-ils ?
  • Quelle énergie suis-je prêt·e à consacrer ? À quel rythme ?

Selon l’INSEE, une personne sur cinq découvre une activité associative ou citoyenne dans ses trois premières années de retraite.

8. Suis-je prêt·e à accueillir les imprévus et à réajuster mes plans ?

Certains partent avec un agenda complet… puis se ravisent, d’autres, plus prudents, se révèlent étonnamment audacieux. Aucun schéma n’est figé : la réalité de la retraite, c’est la capacité d’adaptation. Des imprévus positifs (voyages, rencontres, naissance de petits-enfants) ou plus difficiles (problèmes de santé, deuil) viendront forcément fragiliser ou renforcer votre trajectoire.

  • Suis-je à l’aise avec le fait de bousculer mes certitudes ?
  • Ai-je confiance dans ma capacité de résilience ?

Comme le rappelle le très officiel Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, « la retraite est un laboratoire d’adaptation sociale et personnelle continue » (vie-publique.fr).

Faire de la retraite un projet vivant, pas une fin d’histoire

Franchir le seuil de la retraite, c’est faire le choix d’un nouveau projet : pas une reconversion forcée, mais une opportunité de s’inventer, de tisser de nouveaux liens, de transmettre un savoir et de s’épanouir différemment. Les bonnes questions seront parfois remises sur la table — et c’est tant mieux : la retraite, c’est aussi la liberté de réévaluer ses priorités, année après année.

Les études montrent toutes que les retraité·es qui se sentent acteur·rices de leur nouvelle vie sont en meilleure santé physique et psychique, et se disent plus heureux·ses (Anact, « Bien-être et retraite », 2023). La société a besoin de leur expérience, de leur enthousiasme et de leur capacité d’entraînement : la vraie richesse, c’est là qu’elle se niche.

Se poser les « bonnes » questions n’est donc pas une contrainte ou un exercice de style : c’est la clé pour garder un engagement face à cette nouvelle étape. Pour soi d’abord, pour les autres ensuite. À chacun d’y mettre sa couleur, son rythme et son énergie.

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